[INTERVIEW] Chef de régulation au sein du Centre de commandement unique du RER B
Vous êtes nombreux sur ce blog à m’interroger au sujet de l’exploitation des trains de la ligne B. J’ai ainsi rassemblé quelques unes de vos questions pour les soumettre à Thomas, chef de régulation au Centre de commandement unique, qui occupe une place centrale dans la gestion des circulations.
Bonjour Thomas, peux-tu présenter à nos voyageurs le métier de chef de régulation au sein de Centre de commandement unique du RER B ?
Le métier de chef de régulation couvre un large éventail d’activités allant de la gestion des circulations à la gestion de l’énergie électrique.
Nous veillons en toutes circonstances à la sécurité des voyageurs et des agents de la ligne, ainsi qu’aux installations et au matériel roulant, durant le service voyageurs, mais aussi, en dehors (où s’opèrent une grande partie des travaux de maintenance).
Lors d’incidents, nous nous efforçons de prendre toutes les mesures utiles pour assurer la continuité des circulations, être au plus proche de l’offre initiale prévue, et fluidifier le trafic le plus rapidement possible.
Justement, lorsqu’un incident survient sur la ligne, que fais-tu concrètement ?
Les incidents auxquels nous sommes confrontés sont de natures variées et peuvent être portés à notre connaissance de différentes façons.
Si par exemple un acteur sur le terrain me signale un problème ou qu’un système déclenche une alerte au Centre de commandement unique, ma première préoccupation est toujours la sécurité. Selon la gravité du signalement, je peux être amené entre autres à arrêter la circulation d’un ou plusieurs trains ou à couper l’énergie électrique.
Mon travail consiste ensuite à collecter le maximum d’informations pour permettre la meilleure gestion possible de l’incident. Dans le cas d’une alarme au Centre de commandement unique sur une installation (voie, signalisation, caténaire), je dois alors contacter au plus vite les services techniques concernés pour vérification et intervention.
Lorsqu’un malaise voyageur survient à bord d’un train, je me mets en relation avec le conducteur, le personnel en gare et les services qui sont en lien direct avec les secours et les forces de l’ordre. Il me faut donc superviser l’incident de manière locale et avoir une vision globale de la ligne et des circulations pour prendre les mesures de régulation nécessaires.
Ainsi, mon travail est de prévenir les sur-incidents pouvant découler d’une situation, tout en organisant au mieux la continuité du service pour nos voyageurs.
Peux-tu nous donner quelques exemples de mesures de régulation ?
Lorsqu’un incident survient sur la ligne, je peux être amené à retenir les trains en gare pour leur éviter de stationner en pleine voie, modifier leur trajet en les rendant omnibus pour compenser une suppression ou éviter qu’ils n’arrivent trop vite sur le lieu d’un incident, ou encore, ordonner des circulations à contresens pour « contourner » le train qui serait immobilisé.
Je peux également être amené à prendre des mesures d’allègement du plan transport, autrement dit : diminuer le nombre de trains prévus ou changer leur desserte si un incident a pour effet de considérablement ralentir la circulation et que sa résolution nécessite un certain temps.
L’objectif est d’éviter une paralysie des circulations qui fait chuter la vitesse commerciale des trains et amplifie considérablement l’accumulation du retard.
L’allègement du plan de transport peut-il être évité ?
L’allègement du plan de transport est une mesure parfois mal comprise de nos voyageurs.
Cela n’est jamais une décision que l’on prend avec plaisir mais faire rouler 20 trains par heure sur une voie qui ne peut techniquement en absorber que 12 en cas d’incident peut avoir des conséquences graves sur la sécurité, comme une évacuation spontanée de voyageurs sur les voies… mais aussi, des conséquences désastreuses pour la régularité.
L’accumulation du retard a des répercussions telles que même après la fin d’un incident, plusieurs heures peuvent être nécessaires pour tout remettre en place.
L’allègement du plan de transport permet ainsi d’éviter la création de « bouchons » sur la ligne et de revenir au plus vite à une fréquence régulière.
Pour quelles raisons un incident au nord de la ligne peut-il impacter le sud (et vice versa) ?
Les trains circulent dans leur grande majorité d’un bout de la ligne à l’autre. Quand survient un incident retardant un train, il est impossible pour ce dernier de rouler plus vite que les vitesses limites pour rattraper le retard accumulé.
Lorsque le retard crée un intervalle important entre deux trains, nous prenons des mesures pour diminuer les impacts sur les circulations, en injectant par exemple des trains de réserve à différents endroits de la ligne.
Quand ce retard impacte une ou plusieurs rafales de trains, cela peut entrainer des répercussions dans le sens contraire. Concrètement, des trains qui arrivent avec un retard important en terminus peuvent repartir retardés dans l’autre sens : le conducteur ayant un départ prévu à 8h00 en direction du nord ne peut techniquement pas partir à l’heure si le train qu’il conduit dans l’autre sens arrive trop retardé.
Les voyageurs peuvent néanmoins garder à l’esprit que nous essayons de toujours tout mettre en œuvre pour limiter et résorber ces retards.