Portraits d’agent #9 : Faouzi et Jean-François, conducteurs sur la ligne B « nos annonces créent du lien avec les voyageurs »
Rentrés à la SNCF il y a plus de 20 ans, Faouzi et Jean-François animent tous les jours vos trajets sur le RER B. D’annonces touristiques revisitant les grandes étapes de la ligne, aux calembours cocasses pour vous faire patienter entre deux régulations, en passant par la nécessaire information voyageurs, nos deux conducteurs sont aujourd’hui connus et appréciés pour leurs annonces originales et décontractées. Socle du lien entre les voyageurs et la ligne B, voici leur histoire.
Deux destins liés par le RER B
Tous les deux nés en 1978, nos agents de conduite sillonnent le tracé Transilien depuis plus de 15 ans déjà, alors qu’au départ, aucun ne se prédestinait au métier de conducteur.
Faouzi est mécanicien de formation. Après avoir fini ses études, il s’est rendu à l’évidence, la filière était bouchée et trouver un emploi dans sa branche s’est très vite annoncé compliqué : « malgré tout, j’ai rapidement trouvé un poste dans la logistique à l’Aéroport Charles de Gaulle ». Très vite l’ennui frappe à sa porte et l’envie de changement se fait plus forte chaque jour qui passe : « j’avais besoin de renouveau, j’ai donc postulé à la SNCF un peu par hasard, ils m’ont répondu tout de suite. Je pensais faire de la maintenance, notamment grâce à mon BTS mécanique, mais ils m’ont immédiatement orienté sur un poste de conduite ». Parce que tous les chemins mènent à Ermont-Eaubonne, Faouzi devient agent de conduite en 2001, sur les lignes H et C, après être passé par l’illustre formation « TB » (la formation générique des agents de conduite).
Pour Jean-François, les choses sont un peu différentes : « c’est par une rencontre que ma vie professionnelle a basculé ». Il clôture son parcours universitaire avec un bac professionnel, dans la maintenance de l’audiovisuel. Une fois ses études terminées, service militaire oblige, il s’engage durant une année au « Train », la section qui coordonne et organise la logistique, le transport et l’appui au mouvement de l’armée française, sans savoir déjà que le destin frappait à sa porte. « En revenant de l’armée, je ne savais pas quoi faire. Je rencontre lors d’une sortie roller, un homme avec qui je sympathise vite, et qui me conseille de postuler à la SNCF ». Après une petite initiation, il accroche tout de suite avec le métier et passe dans la foulée une batterie de tests. Comme tous les agents de conduite, il démarre sa formation à la même école que Faouzi, l’école « TB », pour être recruté officiellement en décembre 1997 sur la ligne H.
Une qualité commune, le relationnel
Nos deux agents de conduite sont unanimes : « les attentes des voyageurs ont énormément évolué. Les annonces sur l’information du trafic sont désormais omniprésentes et de plus en plus demandées par la direction de la ligne, sans jamais pour autant être imposées aux conducteurs. Mais elles n’étaient pas courantes quand nous avons démarré ».
A leur début, la norme n’était donc pas encore aux annonces telles qu’on les connaît aujourd’hui. Pourtant, Faouzi et Jean-François ont commencé personnellement à en faire davantage, au départ quand la situation l’imposait, puis très vite, ils se sont prêtés au jeu et ont commencé à faire des annonces même quand tout allait bien. « Cela fut une véritable révélation » pour Jean-François : « Ça a créé tout de suite du lien entre les voyageurs et les conducteurs. Le rapport a changé entre eux et nous ». Même sentiment pour Faouzi qui reconnait « [aimer] créer du lien avec les voyageurs, notamment en faisant des suggestions touristiques sur les différents arrêts de la ligne B ».
Connus désormais pour leurs annonces originales sur la ligne, tous les jours ils sont récompensés par les sourires des passagers qu’ils transportent, pour leur plus grand plaisir.
Les réseaux sociaux, la gloire à portée de clic
Pour nos deux conducteurs, l’arrivée des réseaux sociaux et notamment du compte Twitter de la ligne restent un petit plus. « Les retours sur Twitter ont été un moteur, mais c’est en bonus, ce n’est pas le plus important ». « Ce qui l’est pour moi c’est le contact direct, notamment le sourire des passagers qui sortent de la rame, ou encore leurs commentaires à la fenêtre de ma cabine ». « Certains retours par mails sont très positifs également, donc ça donne de la force bien sûr, mais le plus important reste leur ressenti dans la rame » précise Jean-François. Malgré tout, connus par bon nombre de voyageurs, ils disposent chacun d’un compte Twitter où chaque voyageur peut les remercier pour le moment passé. Alors si l’envie vous prend, n’hésitez plus.
Une vision positive du métier d’agent de conduite
Pour Faouzi, malgré la responsabilité de sécurité ferroviaire qui concerne chaque conducteur et l’obligation d’avoir une conscience professionnelle solide, il faut recommander ce métier. Pour lui c’est une profession d’avenir : « le train n’est pas près de disparaitre et malgré les risques d’accident toujours présents, le jeu en vaut la chandelle ». De plus les perspectives d’évolution sont intéressantes : « La formation dispensée est très complète, on peut conduire une variété de matériels très différents, ce qui permet de se laisser des portes ouvertes ».
Pour Jean-François, les conditions de travail imposent beaucoup de flexibilité : « ce métier demande une gestion du stress très importante, mais impose, en parallèle, une hygiène de vie complexe. On y arrive, on essaye tout du moins ». Il faut également avoir le sens du sacrifice : « c’est une vie qui est spéciale en termes de vie sociale. Les Noël, les Nouvel ans, j’en ai beaucoup passé dans le train, à minuit… « . Malgré tout, selon Jean-François, l’avenir ne sera peut-être pas rectiligne pour les conducteurs : « la technologie va immanquablement prendre du volume. Le métier de conducteurs devra peut-être changer au profit d’un métier tourné autour de la gestion de l’automatisation. Il ne faut pas avoir peur, on assistera peut-être à la disparition de certains métiers, mais sans aucun doute que d’autres dans le même temps seront créés. J’ai tendance à dire que le métier de conducteur est un métier en voie de disparition, dans le siècle à venir. C’est l’avancée normale de la technologie qui prend de plus en plus d’importance, la suite logique des choses ».
En attendant pour notre conducteur de 43 ans, il faut surtout que l’image du « pousse manette » disparaisse de l’inconscient collectif des voyageurs. La technicité d’un agent de conduite est très importante et les contraintes liées au métier méritent d’être connues.
Vivement l’arrivée du MI20 !
Pour le mot de la fin, Jean-François et Faouzi sont unanimes, ils attendent de pied ferme le nouveau matériel roulant de la ligne B, en espérant qu’il arrive le plus vite possible. « Ce nouveau matériel représente un grand défi pour la ligne ». L’arrivée du MI20, est synonyme d’une gestion des voyageurs facilitée, d’une plus grande fiabilité du matériel et plus personnellement d’un plaisir de conduire un matériel à la pointe de la technologie ».
Tous deux espèrent que cela pourra aider à retrouver du respect entre voyageur et conducteurs : « face aux conflits, c’est aux conducteurs de faire le premier pas, sinon les choses n’avanceront pas ».
Faouzi nous précise pour finir qu’agent de conduite « c’est un beau métier, et on essaie de faire mieux chaque jour, dans les conditions parfois compliquées. « Il faut prendre le temps de remotiver les troupes. Le nouveau matériel va beaucoup aider. Les agents comme les voyageurs auront moins d’appréhension à tomber en panne sur un MI20, plus de plaisir à conduire et plus de confort pour leurs trajets du quotidien. Ce qui serait génial : pouvoir prendre part à la concertation sur l’aménagement de la cabine de conduite des nouveaux matériels roulants » !
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